Association pour la Défense de l'Activité Paysanne

CONTE PAYSAN MEDIEVAL

L’OGRE ET LA CASSETTE PUBLIQUE

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Il était une fois ...

… dans une lointaine province, un village, au milieu des collines dans un cadre bucolique qui laissait à penser que la vie s’y déroulait sans histoire.

Or, à cette époque, le village était sous la coupe d’un Ogre, un despote primitif et violent qui terrorisait ses habitants et disait, à qui voulait l’entendre, être « l’ami des puissants ». Il était assisté de sa femme que certains, en secret, qualifiaient de « sorcière », d’un fils peu futé qui lui servait d’espion pour débusquer les oppositions en attendant de succéder à son père, et d’une fille encore moins futée.

L’Ogre régnait depuis des années ; au cours du temps, les relations s’étaient détériorées avec celles et ceux qu’il n’avait pas pu soumettre ou acheter. Il s’était entouré d’un parterre de courtisans qui, soit le craignaient, soit vivaient des miettes qu’il leur accordait, soit le plus souvent des deux. Ayant tous les pouvoirs, et les protégeant jalousement, l’argent public était ainsi dépensé sans contrôle. Celles et ceux qui s’étaient risqués à, sinon demander des comptes, du moins simplement consulter les documents des dépenses, s’étaient vu chassés comme des malpropres par l’Ogre et ses sbires. Parmi ceux-ci, le plus virulent était son fils qui attendait impatiemment la succession pour continuer l’œuvre de son père…

À l’initiative de l’Ogre, Fêtes entre amis, bombances, réunions avec le Prévôt et des seigneurs locaux – tous n’y allaient cependant pas -  se succédaient en même temps que des opérations de prestige et de  « tape-à-l’œil ».

L’Ogre s’était même fait construire, à grands frais, une sorte de grande bâtisse, au milieu du village dont on ne voyait pas très bien l’utilité. Certains disaient, secrètement, que ça pourrait servir, le jour venu, de mausolée pour recevoir son corps embaumé. D’autres n’hésitaient pas à dire que  ses sbires avaient largement profité, de manière privée, du travail effectué sur le chantier, et sur d’autres moins importants. 

Le village, vu son nombre d’habitants et leurs conditions sociales, n’était pas très riche,… pourtant l’argent semblait filer comme un torrent de montagne. L’Ogre, malgré toutes les mesures tendant à dissimuler son action, ne put empêcher l’exposition au plus grand nombre des résultats financiers de sa gestion. Et quand on vint à comparer l’état des finances du village avec les autres villages, l’ampleur de la catastrophe financière sauta aux yeux de tous. Une gazette locale s’empara de l’information et les bruits qui couraient sur ce village devinrent l’objet de toutes les conversations.

Les autorités supérieures, de même que le Prévôt, ne s’en émurent pas pour autant et continuèrent à entretenir les meilleures relations avec l’Ogre, n’hésitant pas à se montrer dans les gazettes en sa compagnie. L’Ogre se crut ainsi protégé et à l’abri de toute contestation. Pourtant, avec les ans, les vexations subies, les consciences, peu à peu, s’éveillèrent.

Les années passant, la santé de l’Ogre déclinant,… il voulait à tout prix que son fils lui succède. Celui-ci, complice de son père dans toutes les manipulations, le souhaitait vivement. La cour de l’Ogre faisait tout pour introniser le dauphin. Le problème c’est que l’hérédité du pouvoir ayant été abolie, il fallait que sa nomination à la tête du village obtienne l’approbation des villageois. Maniant aussi bien la menace sournoise que la démagogie la plus éhontée, l’Ogre et son équipe partirent à l’assaut des suffrages….

Le reste de l’histoire, hélas disparaît, rongée par l’humidité qui détruisit en partie le vieux grimoire dans lequel nous avons puisé la révélation de ces évènements.

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Un enseignement, à l’époque, avait été tiré de cette histoire.

La pratique du pouvoir est une chose trop sérieuse pour être laissée à des individus sans scrupules qui en profitent pour exercer des vengeances personnelles et défendre leurs intérêts privés au détriment de l’intérêt général.

Il existe toujours des individus minables et veules qui vendent au détenteur du pouvoir leurs consciences pour quelques avantages symboliques ou matériels.

Le Peuple, toujours prompt à se révolter – à juste titre – ferait bien, tant qu’il est encore temps, d’éviter de mettre au pouvoir des individus qui joueront contre lui.

Chronique rapportée par Merlin l’Emmerdeur

Cette chronique des anciens temps peut nous paraître, avec le recul, bien exagéré dans son outrance. Après des siècles d’obscurantisme politique et social, l’accès aux Lumières nous mit à l’abri d’une telle situation.

Aujourd’hui la Loi protège, l’Etat de Droit rassure, la République prend soin de ses enfants, les détenteurs du Pouvoir sont respectueux des deniers publics, les agents de l’Etat savent être justes et éviter les dérives du système démocratique en place, procédures et documents sont accessibles et transparents, les Tribunaux jugent en toute indépendance et en contact étroit et permanent avec la réalité sociale.

Il y a cependant des esprits chagrins et/ou provocateurs qui tentent de faire croire que les choses, au travers des siècles n’ont pas changé, qu’ils sachent que ce conte n’est évidemment qu’une fiction. Toute ressemblance avec des personnes vivantes ou décédées serait un pur hasard. Prétendre le contraire serait de la malveillance.